La femme de R. est morte…
18/07/2019 Bonjour à toutes et à tous,
« – La femme de R. est morte… alors pour l’enterrement faut que je trouve une veste noire à mettre sur ma robe à motifs. »
La femme de R. est morte, d’ailleurs elle n’a même pas de prénom lorsque les gens en parlent.
Elle était passée nous voir la semaine dernière.
Ça faisait longtemps qu’on n’avait pas eu sa visite, son mari venait seul.
Elle était venue difficilement, la démarche mal assurée malgré sa béquille.
Plus d’os dans la jambe qu’elle disait, ils lui avaient posé une plaque à la place.
Et la plaque avait causé problème donc il avait fallu tout rouvrir.
De plus il fallait aussi opérer l’autre jambe…
Au moment de partir, elle réclamait des bisous avec insistance.
Comme à mon habitude, je lui ai donné une bonne poignée de main.
Efficace aussi pour éviter les effluves d’alcool.
Paraît qu’elle usait de substances illicites en plus.
N’empêche qu’à l’autopsie il n’y avait trace… de rien.
Y’a des gens, dans les familles, qui sont comme ça stigmatisés.
Je ne peux m’empêcher de repenser aux paroles d’une de mes amies, infirmière auprès de femmes soignées pour alcoolisme.
Elle affirmait que quasiment toutes confiaient avoir un parcours entaché d’abus sexuel.
L’alcoolisme au féminin, ça n’intéresse hélas pas grand monde apparemment, du moins pas plus que les violences faites aux femmes.
Elle était sur un banc, au frais de la fontaine, la dernière fois que nous l’avons croisée, en rentrant ce mercredi-là.
L’air toujours aussi faible que le matin, et très abattue, elle souffrait apparemment dans la position assise.
Nos regards se sont croisés et nous lui avons adressé un sourire, bien désolées et impuissantes face à sa douleur.
Huit jours plus tard, une chute dans les escaliers allait lui être fatale, la femme de R. est morte…
Bien à vous,
Isabelle