« Dernier tour à Toulon »
08/08/2013 Bonjour à toutes et à tous,
Mercredi 6:30
Réveillée en plein rêve, je ne sais si c’est par le chant de la sirène d’à côté qui nous a habitués à des gammes nocturnes ou le raffut des goélands cherchant pitance…
En tous cas, tous les matins, on entend corner les ferries à destination de la Corse.
Je me suis même habituée à leurs ballets incessants sur la Méditerranée.
Au début, cela m’a rappelé mon départ en mai de l’année dernière pour le Cap Corse avec P., quel beau souvenir !
Depuis, je suis passée maintes fois devant la zone d’embarquement, elle fait maintenant partie de mon quotidien.
Mais ce matin, nous avons rendez-vous devant l’Office de Tourisme à 10:00 avec Jean-Pierre Cassely, conteur passionné et passionnant guide national, qui va nous emmener à travers Toulon pour une visite insolite de la ville durant deux heures.
Première rencontre avec Pierre Puget (1620-1694), peintre, dessinateur, architecte et sculpteur, qui réalise de manière très expressive dans cette dernière spécialité deux Atlantes représentant la force et la fatigue sur le portail de l’ancien Hôtel de ville.
Le blason de croix d’or sur fond bleu ornant la sculpture est lié à l’histoire des croisades.
Sur ce port de Toulon, Jean-Pierre Cassely nous racontera aussi le sabordage ordonné par l’amiral de Laborde de 90 bâtiments de la flotte française le 27 novembre 1942 pour éviter leur prise.
Suivra sa condamnation à mort pour cet acte, commuée en prison à perpétuité.
La plage de Toulon restera impraticable durant un an, dévastée par les déchets de ferraille et polluée de mazout…
La condamnation a perpétuité nous ramène à un autre thème sensible du port de Toulon, celui des galères, reconverties en galions équipés de canons.
Suite à cette reconversion, 3000 galériens vont être enfermés à bord d’un bagne flottant dans le port, affectés pour la plupart à des travaux de taille de pierre et de construction de bâtiments.
Reconnaissables par leurs costumes selon leurs condamnations mais aussi leurs affectations, il nous reste encore aujourd’hui beaucoup d’expressions tirées de cette époque.
Quand on dit rentrer marron, ce n’est qu’un terme emprunté aux évadés repris qui étaient affublés d’un bonnet brun…
En parcourant la ville, une halte nous sera proposée en attendant que la cuisson dans le four à bois de la Cade se termine pour la déguster bien chaude.
Cela lui vaudra ce nom, tiré de son origine italienne : calda ! que criaient les marchands ambulants en la proposant à la vente pour éviter de brûler les passants.
Recette de la Cade :
- 125 gr de farine de pois chiche bio
- 25 cl d’eau
- 3 c.à s. d’huile d’olive
- 1 bonne pointe de sel, poivre à volonté
Bien mélanger les ingrédients en incorporant peu à peu l’eau, verser l’appareil sur une grande plaque huilée pour en faire une galette d’environ 1,5 à 2 cm.
Régler le four à 200°, enfourner un peu moins de 10mn sur la grille du haut, en surveillant la cuisson.
La cade doit être grillée sur le dessus et rester moelleuse en dessous.
Découper immédiatement des portions au sortir du four et déguster aussitôt du bout des doigts, avec un rosé de Provence à l’apéritif par exemple.
C’est délicieux, chaud et moelleux et SANS GLUTEN !
Mais le Cade, ou Genévrier cade (Juniperus oxycedrus), c’est aussi un arbuste épineux de terrain calcaire et acide, aux propriétés cicatrisantes, antiseptiques et désinfectantes, traitant les maladies de peau telles que psoriasis et eczéma.
L’huile de cade servait entre autre à soigner les pattes des moutons que les bergers, accompagnés de chiens aux colliers anti-loups acérés, menaient à pied en transhumance à travers les Alpilles.
Le long du parcours, ils les faisaient boire aux fontaines des villes traversées qui fêtaient leur passage, comme Marseille et Toulon.
Pour extraire l’huile, ils construisaient des fours à cade en pierre, tout en récoltant les baies au fur et à mesure des pâtures.
On retrouve trace de cette précieuse huile de cade dans de nombreux produits d’hygiène de l’époque, comme le savon Cadum 🙂
Et la visite de Toulon insolite ne pourra se terminer sans un arrêt devant la statue de cet illustre acteur natif de Toulon, Jules Muraire, dit Raimu (1883-1946) permettant ainsi à notre conteur de placer une anecdote, tout aussi savoureuse que les autres :
Après la représentation de la célèbre partie de cartes dans la pièce de théâtre Marius, Marcel Pagnol laissera sur la tapisserie de la loge de celui-ci :
Monsieur Raimu est un génie
1950
M. Pagnol
Si vous voulez savoir pourquoi, il ne vous reste plus qu’à partir à la suite de Jean-Pierre Cassely que je remercie pour ses talents de conteur, même si je ne peux relater ici qu’une infime partie de cette si agréable visite 😉
Bien à vous,
Isabelle