« Ah ces trouble fêtes ! »
11/04/2025 Bonjour à toutes et à tous,

Ah ces trouble fêtes, sans alcool, sans tabac, sans viande, sans oeufs, sans produits laitiers… liste non exhaustive à laquelle on pourrait rajouter sans gluten.
Ben en fait, bienvenue en Inde, serais-je tenté de dire, où, par convictions religieuses ou culturelles, tout le monde est toléré avec son régime particulier.
Régulièrement, je partage mes repas avec des gens qui ne consomment ni curd ni ghee, d’autres ni omelettes ni gâteaux, d’autres pas de viande ni de poisson.
En fait, ça ne pose de problème à personne, personne n’en fait un plat, c’est le cas de le dire, et personne ne se permet de vous faire des réflexions désobligeantes.
La tolérance est bien plus grande là où la diversité est bien plus grande, y compris culinairement.
J’apprécie cette espèce de souplesse agréable à partager des moments où chacun mange ce qu’il veut ou peut, sans que ça devienne un débat existentiel.
Et mieux encore,, c’est fascinant de réaliser comment la cuisine indienne a su faire de cette diversité une richesse.
Tu peux être végétarien et quand même avoir, dans ton assiette, des saveurs, des textures qui déploient une telle générosité gustative.
Il n’y a pas en Inde, ce sentiment de privation qu’on associe au végétarisme, en Occident.
En France, on aura tôt fait de te taxer de rabat-joie festif quand tu te la ramènes avec ton régime alimentaire particulier.
On est toujours prêt à te rappeler que non, la raclette n’est pas un crime contre l’humanité, quand bien même tu n’as manifesté aucune animosité vis-à-vis des amatrices et amateurs de produits laitiers.
Ce sont les mêmes qui te jettent un regard suspect, te voyant débarquer aux fêtes avec ton houmous maison et tes galettes de sarrasin.
En Inde, c’est presque un art de vivre que de respecter le régime alimentaire de chacun·e sans que ce soit un sujet de friction.
Tu peux avoir à la même table un végétarien strict, un jaïn qui ne mange même pas d’ail ou d’oignon, un carnivore tranquille, et tout le monde trouve son bonheur dans l’assiette.
En Occident, tu as parfois l’impression que manger différemment, c’est faire une déclaration politique, alors qu’en Inde, c’est juste normal.
En France, on va déclarer que la bouffe c’est sacré, avec cette idée bien ancrée et très tranchée que bien manger, c’est forcément manger à la française.
Le bien manger s’articule autour de plein de codes, entrée-plat-dessert, pain, fromage, vin… et tout ce qui s’en écarte est vu comme bizarre, voire menaçant.
Le repas reste encore fortement associé à un moment de partage uniforme, où tout le monde mange la même chose.
Du coup, celui ou celle qui dit, je mange pas de viande, je suis vegan ou j’évite le gluten, casse un peu ce consensus tacite.
Et au lieu de l’intégrer, on le perçoit parfois comme un jugement implicite.
En France, ça reste une nouveauté sociale minoritaire qui s’installe petit à petit de partout, surtout dans les grandes villes.
Mais dans l’imaginaire collectif, refuser du saucisson, c’est encore un peu comme renier sa patrie…
Bien à vous,
Isabelle
Essaouira