« 30 années de rancœur »
18/08/2024 Bonjour à toutes et à tous,
J’ai découvert fortuitement qu’il était possible de nourrir 30 années de rancœur, même symboliquement, à mon encontre, qui plus est.
Cette information m’a choquée, alors j’ai fait une petite introspection, mais fort heureusement, je ne présente pas de comportement pathologique.
L’oubli et l’indifférence ont eu raison ce qui m’était désagréable, préférant mettre de l’énergie ailleurs, plutôt que la focaliser finalement sur des choses extérieures à moi-même.
Certes, cela demande du travail, car qui ne veut pas lâcher son passé s’y raccroche désespérément comme à une corde qui le relierait encore au rivage.
Pourtant, en y regardant bien, la corde n’est raccrochée à rien, il n’y a plus de rivage qui vaille depuis belle lurette…
C’est une illusion du mental qui recrée le film, histoire de se raccrocher à quelque chose qui est vide, en somme, se lover dans une coquille vide, tristesse.
Dans le même temps, merci la synchronicité qui fait toujours des merveilles, j’ai vu un film français, par chance pour ma compréhension au pays du plurilinguisme.
Mais Je verrai toujours vos visages, de Jeanne Herry, a soudain soulevé une vague de douleur en moi, j’ai sangloté pratiquement tout au long du film…
J’avais besoin de l’entendre dans la bouche d’une autre pour le comprendre.
La justice réparatrice, c’est elle qui m’a manqué à plusieurs âges de ma vie ; je n’épargnerai personne ; ni justice, ni réparation.
Comme Chloé, admirablement incarnée par Adèle Exarchopoulos, j’aurais voulu pouvoir dire pour ne plus subir le poids de non-dits durant des années.
Malgré les tentatives de manipulation des agresseurs pour taire l’innommable, elle a pu le faire, mais combien de victimes en ont eu l’opportunité ?
Du côté des condamnés, dans le film, tous crimes et délits confondus, ce n’était vraisemblablement rien, ni violence, ni menace… juste un besoin, une pulsion à satisfaire.
Le constat, crûment balancé alentour, m’a glacé le sang : maintenant que c’est passé, c’est fini… tous ont cette même phrase, à gerber.
Cela réveillait tant de violence en moi, ce ressenti jamais écouté et encore moins par les mis en cause…
Pour certains, la justice a fait son boulot de justice, mais rien n’a jamais été réparé, jamais.
On statue, on instruit, on délibère, on ordonne, dans le désordre et ensuite on classe, à la suivante.
Autour de toi on te dira, oui tu me l’as déjà raconté… pourquoi tu ramènes ça… faut passer à autre chose…
Et puis, toujours ces mêmes phrases maudites dans ta maudite vie de femme si par malheur, un jour, durant une grossesse, tu venais à perdre précocement ton bébé.
Autour de toi on te dira encore, oui tu me l’as déjà raconté… faut oublier… faut passer à autre chose…
Sommes-nous vouées à n’être que des gouffres, des abîmes de souffrances, des plaies vivantes dont personne ne veut entendre les plaintes ?
Alors, n’y changez rien, mon visage vous hantera toujours.
Bien à vous,
Isabelle